Née dans une famille juive aisée de Varsovie, Mela Muter suit les cours de l’école de peinture et de dessin pour femmes de Miłosz Kotarbiński jusqu’en 1900. Elle s’installe ensuite à Paris, en compagnie de son mari, Michal Muttermilch, journaliste, et s’inscrit à l’académie Colarossi puis à celle de la Grande Chaumière. En 1902, elle présente ses œuvres au Salon des beaux-arts, où elle exposera ensuite régulièrement. Trois ans plus tard, elle participe pour la première fois au Salon d’Automne et au Salon des Indépendants. Elle est alors remarquée par le marchand Ambroise Vollard. Artiste emblématique de l’École de Paris, elle fréquente assidument le quartier de Montparnasse, centre de l’ébullition intellectuelle et artistique de ce début de siècle. D’abord influencée par le symbolisme, elle fait plusieurs voyages notamment en Bretagne où elle tire les enseignements de l’école de Pont-Aven. Elle se tourne ensuite vers une touche plus expressionniste qui n’est pas sans rappeler les recherches de Cézanne ou Van Gogh. A l’aube de la Seconde Guerre mondiale, menacée pour ses opinions politiques et ses origines juives elle fuit la capitale et se réfugie à Avignon. Peint sur le recto et le verso de la toile, notre tableau reflète cette période où Mela Muter capture dans ses peintures les paysages que lui offre la Provence avignonnaise. Au recto du tableau, l’artiste peint une sublime vue plongeante de la cité de Villeneuve-lès-Avignon. Constituée d’une multitude de plans, cette composition donne une vision d’ensemble de la ville médiévale en dépeignant à la fois la campagne environnante, le village provençal bordé par le Rhône, les monuments historiques tels le fort Saint-André juché sur une colline à gauche, l’abbaye Saint André au fond à droite et en arrière-plan, une chaine de montagne, probablement le grand Montagnier s’étendant au loin.

Placé à droite de la composition, un couple d’amoureux arpente les sentiers entourés d’Oliviers surplombant la cité médiévale. Au verso du tableau, Mela Mutter peint cette-fois un second village provençal. Placé en hauteur, le spectateur est ici invité à sillonner le village médiéval aux maisons typiquement provençales. La vue plongeante donne une nouvelle fois une vision globale du paysage typique de la région.

Par l’épaisseur de la matière et le geste vif de son pinceau, Mela Muter parvient à conférer à son œuvre une véritable expressivité rappelant la puissance des œuvres de Cézanne.

Elle permet au spectateur de ressentir la vitalité et l'âme de la ville de manière plus immersive. Chaque coup de pinceau est chargé d'émotion, faisant de cette œuvre une fenêtre sur l'interprétation passionnée de l'artiste de Villeneuve-lès-Avignon. C'est à travers cet élan expressionniste que Mela Muter parvient à capturer l'essence même de la ville avec une intensité unique. À travers son pinceau inspiré, Mela Muter capture avec précision les détails architecturaux de la cité, des ruelles sinueuses aux façades ensoleillées. Les couleurs éclatantes qu'elle choisit semblent danser sur la toile, révélant la chaleur du climat méditerranéen qui baigne la région. Le fond bleu profond se marie parfaitement aux teintes chaudes des maisons en pierre, créant une harmonie visuelle envoûtante. L'artiste ne se contente pas de représenter l'architecture ; elle insuffle de la vie dans cette scène.